samedi 29 juin 2013

Histoires d'Exocet

Un documentaire sera diffusé vendredi 5 juillet à 22 heures 30 sur la chaîne France 3, rappelant l'affaire des missiles Exocet utilisés par les Argentins, opposés aux forces britanniques, pendant la guerre des Malouines, dans l'Atlantique sud, au printemps 1982. Et rappelant surtout la délicate question de l'aide française secrète à la marine argentine pour mettre au point ces missiles, alors que le Gouvernement français venait de décréter un embargo sur les armes au moment du déclenchement du conflit.
En particulier, un témoin, qui faisait partie de l'équipe de techniciens français sur place, raconte, dans ce documentaire, sa participation à l'installation de l'équipement permettant aux pilotes argentins de tirer les missiles à partir des avions Super Etendard nouvellement acquis auprès de la France. L'on sait que des Super Etendard ont pu, sans doute grâce à cette aide, atteindre et couler des bateaux anglais, dont le fameux Sheffield, causant de nombreux morts et le traumatisme du Royaume-Uni dirigé par la "Dame de fer" Margaret Thatcher.
Ce technicien, désirant conserver l'anonymat, est filmé en ombre chinoise ou de dos, et avec la voix déformée, à la table d'un restaurant anonyme ; voici une image extraite du documentaire, montrant la conversation entre lui et les deux intervenants menant l'interview :

Or, ce technicien français a pu être retrouvé par le réalisateur Olivier Brunet grâce à... moi-même. En effet, j'avais publié dans l'hebdomadaire Le Marin, du groupe Ouest-France, une série d'articles où j'avais déjà interviewé ce témoin-clé. Voici un extrait du début de mes articles, dans le numéro du 24 décembre 2010 :

L'exclusivité de mes articles et mon aide dans la prise de contact entre le réalisateur et le témoin ont été telles que le documentaire ne pouvait pas ne pas faire référence au Marin (mon nom figure d'ailleurs au générique de fin). Voici deux images extraites du documentaire montrant ce numéro du journal circulant de mains en mains :


Pour l'anecdote, voici, ci-dessous, un document exclusif, non repris dans le documentaire, que m'avait remis le technicien il y a deux ans, et que j'ai publié dans ma série d'articles (il s'agit de la couverture d'un guide du pilote de Super Etendard pour l'utilisation du système de tir des Exocet ; l'illustration en bas de cette couverture, dessinée de façon humoristique, représente un faucon vert, l'emblème de la 2e Flottille de chasse argentine, qui mettait et met toujours en oeuvre les Super Etendard) :

Et pour finir, voici une photo (connue et extraite d'un film) d'un Super Etendard argentin tirant un missile Exocet :

lundi 10 juin 2013

Un Kimono tout neuf

C'est aujourd'hui qu'est livré chez notre distributeur le tout dernier album de la série en bandes dessinées Missions Kimono. En fait, il s'agit de la réédition du tome 2, avec une nouvelle couverture (d'où le titre de ce message : "Un Kimono tout neuf"...). Voici cet album :


Il s'agit de la 4e impression de ce titre, en comptant l'édition originale de 2002.
Au fait, pourquoi la série s'appelle-t-elle Missions "Kimono" ? C'est la question récurrente que l'on nous pose, le dessinateur Francis Nicole et moi-même, à chaque fois que nous présentons nos albums en public, dans un salon ou lors d'une fête aérienne. Ce "Kimono" n'a bien sûr rien à voir avec la tenue vestimentaire traditionnelle japonaise.
Voici l'histoire...
Les avions de la Flottille n°11 de l'Aéronautique navale, "héros" de la série, avaient autrefois pour indicatif radio le mot "Savart". Mais au milieu des années 60, l'état-major de la Marine décida une réorganisation qui impliquait le changement des indicatifs de toutes les flottilles. Un jour - la 11F n'était pas encore installée sur la base aéronavale de Landivisiau dans le Finistère nord, mais dans le Var, à Hyères-Le Palyvestre -, en plein milieu de l'été, ordre fut envoyé à tous les commandants de flottilles de trouver eux-mêmes un nouvel indicatif pour leur unité respective. Le mot à choisir au sein de chaque flottille devait avoir pour initiale une lettre correspondant à son numéro, dans l'ordre alphabétique : la flottille n°1 devait avoir un indicatif commençant par la première lettre de l'alphabet, le A, la flottille 2 par B, la flottille 3 par C, etc. La 11F devait donc avoir pour initiale  la 11e lettre de l'alphabet, soit K. Quel mot choisir commençant par un K ? C'est un ancien pilote de la 11F, M. Jacques Comby, qui me l'a raconté en 2012, lors de cérémonies à la 11F, sur la base de Landi même (M. Comby fut commandant de la 11F du 1er août 1967 au 1er août 1968 ; l'épisode qu'il raconte s'est déroulé bien avant cette période) :
"L'ordre de Paris disait : "Vous avez trois jours pour trouver un nouvel indicatif". Sous-entendu : ne traînez pas... Avec mon commandant, à deux, nous avons réfléchi. Nous savions que sur les bases de l'Aéronavale, il devait se dérouler la même chose, mais nous, nous devions trouver un mot commençant par un K... Pas facile ! Or, il fallait un mot court, en deux syllabes. Nous avons pris un dictionnaire et commencé à éplucher tous les mots commençant par K. Tout y est passé : Kobé (ville du Japon), Koala, etc... On est tombé aussi sur Kimono. Je me souviens bien de notre perplexité, hésitant entre Koala et Kimono car le choix d'un mot de 3 syllabes passant bien à la radio était limité. Kimono, c'était pas mal du tout. Que faire ? On s'est dit : "Tant pis, on prend quand même Kimono, on verra bien." Et finalement, ça a été accepté."
Depuis 1966, la flottille n°11 porte donc cet indicatif. C'est aussi pourquoi, à l'occasion de l'évocation de cette anecdote, j'ai intitulé le présent message : Un Kimono tout neuf... Lorsque j'ai créé la série BD, en 2000, j'ai imaginé un titre général tournant autour du mot Kimono. Ce fut : Missions Kimono. C'est-à-dire : les missions des avions ayant "Kimono" pour indicatif. Le logo du titre a d'ailleurs changé au fil des ans. Voici la première mouture, dès 2001, et en dessous la deuxième, en 2007 :


Cet indicatif, Kimono, est tellement présent et connu que, lorsque l'Aéronavale française et son porte-avions Charles de Gaulle se rendirent en océan Indien pour combattre les Taliban en Afghanistan, fin 2001 (après les attentats terroristes contre le World Trade Center à New York, en septembre de cette année-là), les avions français adoptèrent au sein de la coalition alliée l'indicatif Kimono, alors que les Super Etendard embarqués étaient ceux de la 17F, dont l'indicatif est Quina (Q, 17e lettre de l'alphabet). Et pendant des années, les chasseurs bombardiers catapultés du porte-avions s'appelèrent les Kimono...