vendredi 16 décembre 2016

Angers 2016

Le 18e festival BD d'Angers (Maine-et-Loire) aura lieu ce week-end (17 et 18 décembre). Et devinez quoi ? J'y présenterai mes ouvrages, BD et autres (mais sans les dessinateurs des BD Missions Kimono, Allan Mac Bride et Quentin Foloiseau). Voici l'adresse du site :
http://angersbd.fr/index.php/le-festival

Et voici l'affiche :

samedi 3 décembre 2016

Fidel Castro et le "Granma"

Dans l'hebdomadaire Le Marin auquel je collabore depuis 32 ans, je publie actuellement une série d'articles sur Fidel Castro, ou plutôt sur le fameux (?) bateau qui lui a permis de revenir d'exil à Cuba en 1956 et de conquérir le pouvoir.

Ce bateau, un petit yacht, s'appelait - et s'appelle toujours, d'ailleurs - le Granma. Depuis le numéro du 1er décembre du Marin, je raconte donc l'histoire du périple un peu fou de l'équipage et des 82 hommes embarqués, plutôt entassés, sur cette petite unité. La publication de ces articles a été décidée en urgence suite au décès de Fidel Castro à Cuba, le 25 novembre dernier. D'autant que ce voyage s'est déroulé il y a exactement 60 ans : un anniversaire "rond", donc, qui tombait bien pour raconter une telle histoire.

Dans la précipitation, il m'a fallu préparer le dossier qui, au sein de ma rubrique, a pris la place de l'article historique que j'avais initialement prévu et déjà envoyé. Voici les deux pages de l'article sur le Granma dans le numéro du Marin en question, au sein de ma rubrique intitulée Mémoire de l'histoire :

Comme c'est (volontairement) illisible sur les visuels préparés par mes soins, je montre quand même, ci-dessous, un recadrage sur la fiche technique décrivant le Granma, pour ceux que cela intéresse :

Voici aussi la Une du même numéro du Marin :

Avec un recadrage sur l'annonce de l'article :

Je crois que c'est la seconde fois en 32 ans qu'un de mes articles historiques est annoncé en Une de cet hebdomadaire. La première fois, c'était à l'occasion d'une enquête apportant des révélations sur l'affaire des vedettes de Cherbourg (enquête parue en décembre 1984, quinze ans après le détournement de cinq vedettes militaires initialement destinées à Israël mais bloquées à Cherbourg suite à un embargo décidé par le général de Gaulle).

Comme je le raconte dans l'article du Marin sur le Granma, ce bateau, religieusement conservé à Cuba de nos jours, porte le nom que lui avait donné son ancien propriétaire américain, en hommage à sa grand-mère (grand mother en anglais, mais le diminutif affectueux de grand mother est "Granma"). Ainsi, non seulement ce nom typiquement américain a été celui du bateau acheté par Castro en 1956 pour mener sa révolution finalement anti-américaine, mais en outre, ironie du sort, l'organe officiel du Parti communiste cubain porte depuis le même nom, en hommage au bateau... Le journal existe toujours ; voici Castro en personne montrant la Une de Granma :

Il n'existe apparemment pas de photo prise durant le voyage du yacht. Pour l'anecdote, en voici une de Castro et de ses hommes une fois débarqués clandestinement du Granma, alors qu'ils prennent le maquis dans la montagne cubaine :

On voit son frère Raul, dans le bas de la photo.

Et voici un écusson récent rendant hommage au vénéré Granma :

Le récit complet sur le Granma est à suivre dans les prochaines livraisons du journal Le Marin.

A signaler que mon article dans Le Marin tient sur deux pages, alors que la rubrique Mémoire de l'histoire n'occupait jusqu'à présent qu'une page. Il se trouve que depuis le numéro du 4 novembre dernier, le journal se présente sous une nouvelle formule, à l'occasion du 70e anniversaire de sa création (fin octobre 1946). Pour l'occasion, son format a légèrement diminué et sa police de caractère a été légèrement augmentée. Du coup, pour que le contenu de ma rubrique soit à peu près aussi dense que naguère, on m'a proposé de l'étaler sur deux pages.

Par ailleurs, dans le cadre de cette nouvelle formule, le jour de sortie du journal a changé ; ce n'est plus le vendredi, mais le jeudi. Ce qui était d'ailleurs son  jour de sortie à l'origine, en 1946-47. Mais pendant la majeure partie de sa vie, ce journal de la marine marchande et de la pêche, émanation et filiale du quotidien Ouest-France, est sorti le vendredi. Un vieux journaliste de la rédaction me disait souvent, quand j'ai débuté : "C'est normal qu'il sorte le vendredi. C'est le jour du poisson...".

mercredi 23 novembre 2016

Evreux 2016 - et des nouveautés

Dimanche prochain, 27 novembre, le public pourra rencontrer des auteurs de BD d'aviation sur la base d'Evreux (27), à l'occasion du festival Bulles d'Air 2016. Francis Nicole y sera également (ainsi que le samedi, jour réservé aux gens de la base), avec notre série Missions Kimono.

C'est l'occasion de montrer pour la première fois la couverture du tome 18 de Kimono, à paraître au printemps prochain :

Ainsi qu'un extrait (encore au crayon) de la planche 31, la dernière dessinée à ce jour (j'ai volontairement effacé les dialogues) :

Et de montrer aussi la couverture d'Allan Mac Bride, tome 5 en préparation lui aussi pour parution au cours du printemps 2017 :

Et un extrait de cet album (la planche 32, la dernière dessinée elle aussi) :

Pour en revenir au festival d'Evreux,voici l'affiche :


jeudi 27 octobre 2016

Cap sur Saint-Malo

Le festival BD de Saint-Malo a lieu ce week-end (à partir de demain - 28 octobre - jusqu'à dimanche soir, 30 octobre), et bien sûr j'y tiendrai un stand, comme chaque année, avec en particulier mes séries Missions Kimono et Allan Mac Bride.

Voici l'affiche du festival, due au dessinateur Sylvain Vallée :


Et voici deux images extraites des dernières planches dessinées par Francis Nicole (Missions Kimono ; Francis sera présent au festival) et par Patrick Dumas (Allan Mac Bride). D'abord Kimono tome 18 :

Et ensuite, Allan Mac Bride tome 5 :

Curieux hasard : ce sont toutes les deux la planche 29B de chaque histoire.
Il en reste donc un petit paquet à dessiner...

lundi 24 octobre 2016

Jo Gaillard

Sympathique rencontre à Paris le 12 octobre dernier, avec Patrick Préjean, acteur de théâtre, de cinéma et de télévision (et aussi la "voix" française de nombreux personnages de films et dessins animés).

Patrick Préjean jouait le rôle du "coq" (surnom du cuisinier) à bord du cargo Marie-Aude du feuilleton télévisé Jo Gaillard, diffusé à la télévision française en 1975 (le héros, le capitaine Jo Gaillard, était joué par Bernard Fresson). Ce feuilleton semble avoir marqué les esprits de beaucoup de jeunes téléspectateurs à l'époque. Or, pour le journal Le Marin, où je m'occupe de la rubrique historique, j'ai publié ces temps-ci une série d'articles sur ce feuilleton, son tournage et sur le vrai cargo à bord duquel furent embarqués les acteurs et l'équipe de télévision dirigée par le réalisateur Christian-Jaque.

La raison de cette publication : le cargo venait d'être envoyé à la démolition dans un chantier turc. C'était l'occasion pour moi de parler de ce cargo, et d'interviewer le seul acteur français encore vivant de nos jours qui ait participé au feuilleton ; Patrick Préjean a donc pu évoquer ses souvenirs de cette lointaine époque.

Voici le volet de ma rubrique (intitulée Mémoire de l'histoire) où commence l'interview de Patrick Préjean :

Avec un gros plan sur le titre :

Ici, un gros plan sur le début de l'interview, où l'acteur dit à quel point le tournage de ce feuilleton a compté pour lui :

Et un gros plan sur l'encadré racontant la (longue) carrière du cargo Marie-Aude, pour ceux que l'histoire maritime intéresse - mais pour ça, le mieux serait de s'abonner au Marin, car dans chaque numéro, je publie des articles généralement exclusifs... :

Comme Patrick Préjean, au moment de notre rencontre, avait commencé à jouer dans une pièce de théâtre à Paris (Le Schmilblick, d'après des textes de Pierre Dac, au théâtre d'Edgar près de Montparnasse, jusqu'en janvier prochain), nous nous sommes donnés rendez-vous à la sortie de la pièce à laquelle j'avais pu assister (excellent jeu d'acteur de Patrick Préjean, et de son confrère Jérémy Prévost).
Voici deux photos prises devant le théâtre, boulevard Edgar Quinet :
Photo prise dos à la façade lumineuse du théâtre d'Edgar,
sur fond d'affiche de la pièce Le Schmilblick.
Photo prise dans l'autre sens, dos au boulevard,
avec un autre éclairage (photos : Anne Le Gall).
Voici pour l'anecdote le premier chapitre de la série d'articles sur Jo Gaillard dans Le Marin et racontant la genèse du feuilleton :

Et le cinquième et dernier chapitre, avec la fin de l'interview de Patrick Préjean :

vendredi 7 octobre 2016

Thoréfolivres

Thoréfolivres : drôle de nom. C'est le  nom de l'association qui, depuis cinq ans, tient le salon du livre de Thorigné-Fouillard, un village des environs de Rennes en Bretagne. Et j'y serai ce dimanche 9 octobre pour tenir un stand avec mes ouvrages habituels. Voici l'affiche :

On me demande parfois pourquoi je participe à des petits salons non loin de chez moi, alors qu'il serait plus intéressant et rentable de participer à de "grands" salons ailleurs, en France ou à l'étranger. Certes... Mais faut-il négliger les "petits" salons près de chez soi...?
En tout cas, une trentaine d'éditeurs ont pensé comme moi et seront présents également, certains venant d'autres régions que de Bretagne.

vendredi 30 septembre 2016

Week-end à Cholet

Petit compte-rendu, avec un peu de retard...
Beau séjour sur l'aérodrome de Cholet, le week-end dernier (voir mon précédent post). La principale journée était quand même le dimanche, celle où la foule fut présente pour assister aux démonstrations en vol.
Coup de bol : le commentateur du programme de ces démonstrations, qui connaît la série Missions Kimono, est venu me voir la veille sur mon stand et a découvert - Ô surprise - un exemplaire d'un de mes livres maritimes (je les avais apportés à tout hasard...), celui sur le paquebot transport de troupes Pasteur. Or, son père a fait un voyage mémorable sur le Pasteur pendant la guerre d'Indochine. Donc : non seulement, le commentateur a acheté un exemplaire pour en faire cadeau à son père, mais en outre, le dimanche, il a annoncé au micro la présence de mon stand et de mes ouvrages, non loin de son podium...

Souvenirs en  images : voici l'aérogare (photographié de loin, par-delà la piste, depuis l'espace dévolu aux stands dont le mien) :

Voici quelques avions anciens présents. Ici, un alignement sur le parking en herbe (du même côté que la photo précédente) :

Un superbe Catalina britannique :

Un classique DC-3 :

Deux Dassault Flamant, dont un à nez vitré, passent au-dessus de la foule :

Il y avait aussi de nombreux véhicules de la Seconde guerre mondiale : Jeeps, GMC, etc., et cette ambulance :

Ce départ fumant de deux avions à réaction est celui des Albatros L-39 de la patrouille Sparflex :
Toutes photos : J-Y Brouard
L'un des deux est piloté par un ancien militaire de la 11e Flottille de Landivisiau, Aymeric de Valence, surnommé "Baron" au sein de l'Aéronautique navale. On le voit deux ou trois fois dans la série BD Missions Kimono, par exemple en haut de la planche 11 de l'album 13, Rafale sur l'Arctique (dessin de Francis Nicole) :

jeudi 22 septembre 2016

Fou d'ailes

Le meeting aérien de Cholet, sur le petit terrain au nord de cette ville du Maine-et-Loire, s'appelle Fou d'ailes, comme chaque manifestation (un an sur deux), et aura lieu ce dimanche 25 septembre. Mais il commence en fait la veille. Voici l'affiche annonçant principalement la journée du 25 et aussi celle du 24 :

J'y serai avec un stand, pour présenter en particulier les BD Missions Kimono. A ne pas manquer, pour tous ceux qui habitent hors de Bretagne, dans les pays de la Loire et près du centre de la France.

Le programme (intéressant) est ici :
http://www.cholet.fr/dossiers/dossier_3901_fou+ailes+-+fete+aerienne.html

mardi 6 septembre 2016

Rentrée pour tout le monde

En cette période de rentrée scolaire, de rentrée de vacances pour beaucoup encore, voici deux petites images pour montrer que les BD Missions Kimono 18 et Mac Bride 5 continuent d'avancer, doucement mais sûrement...
Ici, un extrait de la planche 113 (113 de l'aventure globale, mais 21 de l'album n°18) du prochain Missions Kimono :

Et ici, un autre de la planche 25 d'Allan Mac Bride 5 :

Aucun titre n'est encore prévu pour ces deux albums à paraître en hiver ou au printemps 2017.

samedi 23 juillet 2016

Derelict, de la fiction à la réalité (et vice versa)

Au début des années 1980, un fait divers avait attiré mon attention : le naufrage d'un cargo pris dans une tempête, bombardé par des avions Super Etendard de l'Aéronautique navale française car il devenait dangereux pour la navigation maritime. Les appareils avaient décollé de la base d'Hyères (Var) ; le cargo partait en effet à la dérive en Méditerranée et s'approchait de la côte corse, alors que son équipage en perdition avait abandonné son navire. En plus, le cargo transportait une cargaison de cigarettes de contre-bande.

C'est essentiellement ce dont je me souviens aujourd'hui, et ce sont, en tout cas, les éléments suffisants qui m'avaient incité à l'époque à imaginer une histoire en bandes dessinées extrapolée de cette mésaventure - mon premier scénario sur le thème de l'Aéronavale. La BD sera titrée Derelict (terme adéquat, anglais, qui signifie : navire abandonné et à la dérive) ; publiée d'abord dans le journal de Tintin en 1988 (et traduite en néerlandais dans la version hollandaise du magazine), elle sera reprise dans Week-BD, le supplément BD et hebdomadaire d'un quotidien suisse, et enfin dans les premières pages de l'album Missions Kimono n°1, édité en janvier 2001 chez JYB-Aventures, la structure éditoriale que j'avais créée en 2000. Cet album est le premier d'une longue lignée ; ceci m'a permis de devenir éditeur, ce que je suis toujours. Comme quoi cette histoire a un rôle important dans ma carrière...
La nouvelle couverture de Missions Kimono 1,
avec sous-le titre Derelict.
Ce n'est que récemment que j'ai entrepris des recherches historiques pour retrouver la véritable affaire. C'est ainsi que j'ai su que l'événement date du 14 mars 1983 et que le cargo s'appelait Niagara, ce que j'avais totalement oublié depuis le temps ; j'ignorais aussi qu'il battait pavillon panaméen, et qu'il s'agit en outre d'un ancien bananier français, le Fort Niagara. Le détail de la véritable mission aérienne, dont j'ai pu prendre connaissance en 2016, est finalement différent de ce que j'ai imaginé en BD (ainsi, dans le fait réel, il y avait quatre Super Etendard, et non deux ; par ailleurs, en raison des circonstances et des conditions particulières, les avions n'avaient pas réussi à couler le cargo...). Mais peu importe ; dans ma BD j'ai imaginé ce que j'ai voulu.
Voici, pour les anglophones, l'extrait d'un livre anglais, Disasters at sea, qui cite le cas du Niagara (et les quatre Super Etendard de la "French Navy") :

Déjà, dans mon idée de scénario, j'avais modifié le point de départ : le cargo fictif transporte de la dynamite et les avions, ignorant l'information puisque le cargo est le vecteur d'un trafic clandestin, sont victimes de cette cargaison : en passant au-dessus de l'objectif après avoir largué ses bombes, l'un des Super Etendard reçoit des éclats consécutifs à l'explosion de la dynamite, et, plus ou moins endommagé, ne revient à sa base que difficilement (d'où un petit suspense à mettre en scène et à faire vivre au lecteur).

Je connaissais depuis peu le dessinateur Francis Nicole, avec qui j'avais déjà réalisé une première BD d'aviation militaire : Traquenard sur le reg, mettant en scène, sur huit planches seulement, des avions Jaguar de l'Armée de l'air, et qui ne paraîtra dans la revue Air Fan qu'en 1987, après divers déboires pour trouver un publicateur. Dans la foulée de cette histoire avec les Jaguar, j'ai proposé à Francis de dessiner celle avec des Super Etendard, car il était déjà "branché" sur l'Aéronavale : maquettiste, il réalisait des maquettes d'avions de l'Aéronavale et était par ailleurs membre de l'Ardhan (Association pour la recherche de documentation sur l'histoire de l'Aéronautique navale). Tout cela tombait bien pour que Francis dessine cette future BD sur un thème qu'il connaissait et appréciait.
Décollage des deux Super Etendard pour aller bombarder un cargo à la dérive,
dans l'histoire Derelict.
J'imaginais d'écrire une histoire en quatre planches seulement, pour diverses raisons, la première étant qu'il n'y avait pas de quoi tirer un album entier du fait divers. J'avais en vue aussi, à l'époque, une revue mensuelle éditée par les Armées françaises, TAM (initiales de Terre, Air, Mer), qui publiait des BD en quatre planches et pas une de plus.
Francis me parle alors d'un ancien pilote de Super Etendard, membre comme lui de l'Ardhan, un officier du nom de Robert Feuilloy : celui-ci pourrait utilement me conseiller pour écrire une histoire qui tienne - si j'ose dire - la route (Robert Feuilloy est devenu entre-temps le secrétaire général de l'association Ardhan ; je parle déjà de lui sur mon blog, à ce lien : http://jybaventures.blogspot.fr/2012_04_01_archive.html ). Le hasard fait que ce monsieur, ayant dépassé l'âge de piloter en flottille, travaille alors à l'état-major de la Marine à Paris, rue Royale, sur la place de la Concorde. Comme j'habite à Paris à l'époque, je prends rendez-vous avec lui pour mettre au point le scénario de ma future BD.
Un pilote de Super Etendard en vol.
Je rencontre une première fois M. Feuilloy rue Royale. On discute à bâtons rompus du déroulé de la mission, et je prends des notes. Il me dit d'emblée que pour attaquer un bateau comme ça, en raison du "plafond" bas, il faut utiliser des bombes freinées, c'est-à-dire des bombes retenues par un petit parachute qui ralentit la vitesse de la bombe et lui permet d'atteindre son objectif plus facilement tout en étant larguée à basse altitude, et surtout en laissant à l'appareil tireur le temps de prendre du champ, de dépasser l'objectif et de ne pas être atteint par l'explosion de ce dernier. Ceci me tracasse : car je voulais justement que des débris projetés en l'air à bonne hauteur atteignent l'avion et l'endommagent d'une façon ou d'une autre ; mais avec des bombes freinées, qui sont donc "étudiées pour", ce n'est pas possible que le scénario se déroule comme je l'ai prévu.

Or, Robert Feuilloy m'apprend que deux avions partent ensemble, comme n'importe quelle patrouille en mission ou en exercice, pour attaquer le bateau l'un après l'autre : le leader tire d'abord ses bombes, et le numéro 2, ensuite, fait de même dans le sillage du premier. J'imagine donc que ce sont les bombes du leader qui font exploser avec un temps de retard les munitions du cargo, et que c'est pile au moment où le n°2 passe au-dessus de l'épave, après avoir largué ses propres bombes freinées, que le navire explose et que des débris touchent le dessous du fuselage du n°2. C'est moi qui propose que le train avant du n°2 ne peut plus sortir, après avoir été touché par des débris dus à l'explosion, et c'est Robert Feuilloy qui suggère que des débris occasionnent une fuite de liquide hydraulique à ce train avant, ce qui empêche la jambe du train de sortir. C'est aussi Robert Feuilloy qui me dit que le pilote touché par les débris indique dans une bulle, en revenant au terrain, qu'il ne largue pas ses bidons de kérosène supplémentaires (disposés sous les ailes), car ces bidons (vides) vont servir de patins au moment de se poser sur la piste, le train avant ne pouvant sortir. J'ai donc inséré une image pour cela :
Les deux Super Etendard rentrent à la base (dans la BD Derelict).
Je profite de l'occasion pour demander à mon conseiller à quelle flottille de l'Aéronavale appartiennent les appareils de la BD. "A la 11e Flottille, bien sûr !", s'exclame Robert Feuilloy, lui-même un ancien de la 11F. C'est pour cela que, depuis, pour une simple question de continuité et de fidélité, je mets en scène des pilotes et des avions de la 11F dans les BD dessinées par Francis Nicole... A noter que dans l'attaque réelle en 1983, les quatre appareils qui ont attaqué le Niagara provenaient, pour les deux premiers, de la flottille 17F - donc une autre flottille - et avaient décollé de la base d'Hyères : c'est pourquoi j'avais mis en scène un décollage d'Hyères dans ma BD ; si j'avais choisi la 17F pour mon scénario, ma série Missions Kimono n'aurait peut-être pas vu le jour, du moins sous cet intitulé, puisque le titre "Kimono" reprend l'indicatif radio authentique de la 11e Flottille ; l'indicatif radio de la 17F étant Quina, ma série se serait peut-être appelée Missions Quina... A quoi tiennent les choses... Quant aux deux autres Super Etendard de l'opération réelle, ils proviennent bien de la 11F, mais ils avaient décollé du porte-avions Foch - ce que j'ignorais...

Puis, j'écris le scénario à partir de toutes les informations glanées auprès de Robert Feuilloy, comme les bombes freinées de 400 kg, l'altitude de 300 pieds à laquelle les avions attaquent le cargo à la dérive, etc. De même, un certain nombre de dialogues typiquement "aéronavale" sont dus à Robert Feuilloy, comme les deux bulles dans la case ci-dessous :

Francis dessine les quatre planches. Il commence par faire ce qu'on appelle des "roughs" ; ici, ceux des planches 1 et 2 :

Et ici les planches 3 et 4 :

Puis Francis peaufine les crayonnés sur des feuilles d'un plus grand format. Voici par exemple le crayonné de la première vignette où apparaît le cargo en détresse (j'avais choisi un vieux Liberty ship, ce type de navires, sur lequel j'ai une imposante iconographie, datant de la guerre et pouvant encore naviguer au début des années 1980...) :
Le nom du cargo en perdition dans la BD est Victoria. Sans doute avais-je connu,
à l'époque de l'écriture du scénario, le nom réel du cargo bombardé - Niagara -,
car celui de la fiction semble s'en inspirer, y compris par le nombre de syllabes.
Hélas, plus de 30 ans plus tard, je ne me souviens pas de ce détail...
Puis je reprends contact avec Robert Feuilloy et, dans son bureau à l'état-major, lui fait lire les planches de la BD pour avis et éventuelles corrections. Il nous fait modifier certains détails. Ainsi, je mettais en scène un opérateur radar qui tutoie le pilote pour le guider jusqu'à la piste. Robert Feuilloy me rétorque : "Ah non, le radariste vouvoie le pilote !" De même, j'avais imaginé que l'avion sans train avant sortirait son parachute-frein pour rouler le moins longtemps possible sur la piste, ce que Francis avait dessiné, mais Robert Feuilloy m'apprend que cela risquerait au contraire de provoquer un accident. Nous devrons donc supprimer le parachute-frein et ajouter en conséquence une bulle ; voici la première version du dessin (que j'ai publié dans l'album Kimono 1, dans une page de "bonus") :

Et voici la version corrigée, et en couleur pour l'album :

Ensuite, c'est la quête d'un journal pour publier cette BD. La revue TAM, hélas, a changé entre-temps de formule et ne publie plus de bandes dessinées (et d'ailleurs elle cessera de paraître peu après). J'envoie des photocopies de la BD au journal de Mickey, à Spirou (pas de réponse), à d'autres je crois, et à Tintin. Or, trois ou quatre ans auparavant, j'avais déjà proposé au rédacteur en chef de Tintin, Jean-Luc Vernal, la BD Traquenard sur le reg (dessinée, il faut le préciser, à titre de test par un premier dessinateur, avant ma rencontre avec Francis) ; JL Vernal m'avait refusé catégoriquement cette BD en me disant : "Des avions militaires, pour moi, ce sont des bombes, c'est la mort. Tant que je serai rédacteur en chef de Tintin, il n'y aura jamais d'aviation militaire dans les pages du magazine !". J'ai donc quand même proposé à nouveau une BD d'aviation militaire à JL Vernal, dessinée cette fois par Francis, sachant à l'avance qu'il la refuserait d'office ! Même si cette BD montre une mission de service public tout à fait pacifique.

Mais, allez savoir pourquoi, JL Vernal change d'avis. Sa secrétaire m'appelle au téléphone et me demande de lui envoyer les planches originales pour faire ce qu'on appelait à l'époque les "bleus" : les épreuves pour la mise en couleur. C'est ainsi que j'apprends que la BD est acceptée pour Tintin. Plus tard, elle me rappelle pour me demander si Francis Nicole peut faire un grand dessin pour la couverture du numéro qui publiera la BD. OK, bien sûr. J'en profite pour demander à la secrétaire comment cela se fait-il que JL Vernal a changé d'avis sur les BD d'aviation militaire et accepté Derelict. Elle me répond : "Oui, mais je crois que Jean-Luc a "flashé" sur les avions de votre dessinateur. Il aime beaucoup sa façon de les dessiner..." Ah bon...

Et c'est ainsi que la BD passe dans le numéro de Tintin en date du 8 mars 1988. A noter que les couleurs de la couverture ne sont pas faites par Francis, mais par le coloriste de la rédaction de Tintin, ce qui fâchera Francis car elles ne sont pas à son goût. A noter aussi que je m'étais ravisé in extremis : alors que le titre devait être "Derelict", j'avais indiqué à la secrétaire que je préférais que ce soit "Le derelict". Ce qui fâchera encore Francis car, lui, préférait "Derelict", sans article... :
La publication de Derelict profite d'un dossier "Aviation"
dans ce numéro de Tintin... La faute du pluriel à "Etendards"
ne vient pas de moi...
Mais mon histoire ne se termine pas là... Au contraire !
En effet, le 8 octobre 1992, je tombe sur un article d'Ouest-France, le grand quotidien régional, édition du Finistère, racontant un événement étrangement semblable non pas à l'événement réel avec le Niagara en 1983, mais semblable à ma BD Derelict. La veille, 7 octobre, un cargo à la dérive en Manche dans la tempête, l'Edith, a été attaqué par des Super Etendard de la 11e Flottille de Landivisiau pour le couler (comme dans ma BD qui mettait en scène des Super Etendard de la 11F - voir plus haut). Or, surprise : de nombreux éléments de l'histoire racontée par l'article d'Ouest-France sont communs à la BD : un cargo à la dérive et abandonné par son équipage dans la tempête, deux Super Etendard (et non pas quatre comme en 1983), de la 11F qui plus est, larguant des bombes freinées de 400 kg, la couche de nuages bas compliquant la mission, etc. Quel hasard, et quelle prémonition !

Je prépare aussitôt un jeu de photocopies de la BD parue dans Tintin (je rappelle que la série Missions Kimono n'existait pas à l'époque, et même qu'il n'en était pas question du tout ni dans mon esprit ni dans celui de Francis) et l'envoie à je ne sais plus quel service de la Marine nationale à Brest (dont dépend la base de Landivisiau). Je reçois rapidement une réponse par courrier, signée d'un amiral : il a beaucoup apprécié la BD et son réalisme, et m'écrit : "Si vous et votre dessinateur voulez visiter la base de Landivisiau, c'est avec plaisir que nous vous accueillerons". Aussitôt dit, aussitôt fait : je contacte qui de droit et obtiens l'autorisation de venir à Landi avec Francis. C'est donc courant novembre 1992 que nous nous rendons en voiture sur la base finistérienne, où nous sommes accueillis, où nous pouvons visiter les locaux et le hangar de la 11F, et photographier autant que nous pouvons. Nous rencontrons surtout les deux pilotes impliqués dans la mission contre le cargo Edith, et qui n'étaient autres que le commandant de la 11F et son commandant en second.

Une anecdote : dans mon scénario, j'avais tenu à prévoir une image où l'on verrait la scène de l'attaque à travers le viseur d'un des deux Super Etendard. Comme nous n'avions pas, dans les années 1980, d'archives photos, Francis n'a pu dessiner cette image que grâce à une description qu'avait faite oralement, et donc avec peu de précisions, Robert Feuilloy. Ce qui a donné ceci (dans le journal Tintin) :

Mais lors de notre visite à Landivisiau, en ce mois de novembre 1992, on nous a remis un lot de photos de l'attaque de l'Edith ; en voici une (la coque retournée est dans le bas à droite de la photo) :

On voit quelques différences avec ce qu'avait fait Francis plusieurs années auparavant... Du coup, quand nous avons lancé l'album Missions Kimono 1, Francis a refait le dessin ; ce qui a donné ceci (édition originale de l'album, janvier 2001) :

Ensuite, il y a eu quelques petites modifications lors de la remise en couleur de l'album, pour sa réédition de 2014 (la note de bas de case - "(1) environ 100 mètres et 900 km/h" - est ainsi ramenée sous la case, et pas en bas de la planche comme l'avait fait Francis au départ) :

Sous le hangar de la 11F, toujours lors de  notre visite à Landi, le commandant en second (CSD en abrégé) nous décrit la mission telle qu'il l'a vécue. J'enregistre ses propos sur un magnétophone, malgré le bruit de fond quand un avion démarre sur le parking. Son récit correspond à ce qu'a raconté Ouest-France. Il faut savoir en particulier que le cargo s'était retourné et flottait coque en l'air.
Sous le hangar de la 11F, un autre pilote discute avec Francis
(photo : JY Brouard).
Une fois le récit terminé, je coupe le magnétophone et nous continuons la visite guidée. En sortant du hangar, le CSD se tourne vers moi et dit : "Au fait, j'ai oublié de vous dire une chose..." Et là, je n'ai pas le réflexe de remettre en route mon magnétophone, d'ailleurs rangé dans mon sac, ce que je regretterai après coup. "Comme j'étais le numéro 2 derrière mon leader, raconte le CSD (selon ce que je me rappelle), je le voyais devant moi en train d'attaquer le cargo. Or, il s'est passé un phénomène extraordinaire auquel je ne m'attendais pas. Les trous provoqués dans la coque par mon leader ont créé une sorte d'appel d'air sous pression, qui a projeté à la verticale un véritable geyser d'eau. J'estime que ce geyser s'est élevé à environ trois fois l'altitude où je volais. C'était impressionnant ! Et, lancé dans mon attaque, je n'ai pas pu dévier et j'ai traversé ce geyser d'eau."
Là, ce fait m'a plus qu'étonné ! Car c'est en fin de compte à peu près l'idée que j'avais imaginée pour mon scénario de fiction, des années auparavant, à savoir que le n°2 subit un "dommage collatéral" de l'attaque du cargo par le leader, en étant touché par des débris projetés vers le haut, plus haut que l'altitude des avions attaquants pour que les débris touchent violemment le fuselage... La BD fut donc prémonitoire, y compris dans cette péripétie que j'ignorais jusque-là...

Ce caractère proche de la réalité a trompé son monde. La revue Week-BD, dont j'ai parlé plus haut (c'était une émanation du journal de Tintin, livrée gratuitement chaque semaine, insérée dans le quotidien helvétique La Suisse pendant plus d'un an à partir de septembre 1989), a republié l'histoire Derelict (re-titré donc Le Derelict...), Voici une partie de la couverture du numéro 45 du 7 juillet 1990 - il y a donc 26 ans, comme le temps passe... -, qui annonce un "Spécial Aviation" :

Or, dans le bandeau de titre de notre histoire, la rédaction a ajouté "Histoire vraie" (ce qui est faux... ou du moins pas tout à fait vrai...) :