lundi 5 novembre 2018

1918-2018 : il y a un siècle, la fin de la guerre de 14

En ce moment est célébrée la fin de la terrible guerre de 1914-1918. Il se trouve que certains de mes aïeuls y ont participé. Hélas je ne connais pas tout de ma famille, mais voici les cas de cinq de mes grands-parents et arrière-grands-parents, et une iconographie en rapport.
Mon grand-père paternel, Henry Brouard, fut infirmier à Verdun. Souvenirs traumatisants, il en gardera des cauchemars jusqu'à la fin de sa vie. Le voici en tenue :

Voici une des récompenses qu'il obtint : une citation à l'ordre du Régiment qui commence par : "Infirmier d'un dévouement exemplaire" etc. :

Je conserve deux objets de "sa" guerre : le masque à gaz qu'il portait dans les tranchées (le cylindre à droite contient le masque enroulé ; à noter que le caoutchouc du masque est toujours souple ; il n'a pas séché avec le temps) :

Et une chaufferette (qui servait à réchauffer le café, la soupe ou toute boisson) :

Il fut très fier de recevoir à Saint-Brieuc, en 1986, au cours d'une cérémonie, la Croix du Mérite militaire pour son action pendant la Grande guerre :

L'autre grand-père, maternel, Théodore Birot, fut mobilisé, mais son jeune âge lui a évité de combattre. En effet, il fit ses classes à Châtellerault entre le printemps et le mois d'octobre 1918 ; au moment d'être envoyé au front, la guerre allait se terminer. Mais son régiment fut ensuite stationné pendant trois ans en Allemagne, dans le cadre de l'occupation des provinces à l'ouest du Rhin. Le voici (à l'extrême droite) avec ses copains de régiment, en Allemagne (on note la fourragère portée par tous à l'épaule gauche, signe de la mise à l'honneur du régiment) :

Le père d'Henry Brouard, donc mon arrière-grand-père, Etienne Brouard, était capitaine de la marine marchande ; voici son portrait sur le pont d'un de ses voiliers :

Mais pendant la guerre, alors trop âgé pour être mobilisé, il fut maître de port à Erquy (Côtes d'Armor). Pour pouvoir utiliser son bateau, dans certaines conditions, il lui fallait une autorisation spéciale. En voici une (peu lisible sur ce document que je ne peux pas agrandir outre-mesure), datée du 27 mai 1915, pour le canot Saint Yves :

Il est mort en novembre 1919, d'une congestion pulmonaire consécutive à une intervention, en pleine tempête, pour tenter de rallumer le phare d'Erquy.

Joseph Erhel, le père de ma grand-mère paternelle, était aussi marin, et capitaine comme l'arrière-grand-père Etienne Brouard. Voici son portrait en 1902 :

Il fut mobilisé en 1914 dans cette fonction de capitaine, sur divers navires. Il vécut une aventure exceptionnelle. Commandant le trois-mâts La Victoire en 1916 et 1917, il transportait du charbon entre le Pays de Galles et Bordeaux, et sur le trajet inverse, des poteaux de mine en bois. Voici une rare photo existante du voilier, sur sa cale de lancement en juillet 1916 à Saint-Malo :

En décembre 1916, le bateau se porta au secours des naufragés d'un sloop de pêche qui avait été attaqué par un sous-marin, et ramena à bon port les marins en perdition. Le 21 janvier 1917, en quittant la Gironde avec une nouvelle cargaison de poteaux de mine, La Victoire fut intercepté par un autre sous-marin. Le commandant allemand fit descendre tout le monde dans un canot et placer des explosifs à bord du voilier. Ayant entendu une explosion et pressés de quitter les lieux, les Allemands disparurent dans la nuit très noire. Or, La Victoire ne coula pas vraiment. Encouragé par le capitaine Erhel et malgré le grand danger imminent, l'équipage français reprit pied à bord, jeta les explosifs intacts à la mer, pompa la cale où l'eau s'infiltrait à cause de la seule explosion qui s'était produite, appela d'autres bateaux au secours, et put revenir au Verdon où le trois-mâts fut sauvé in extremis. Pour cette action d'éclat, le capitaine Erhel reçut une récompense, que voici :

Après réparations, La Victoire repartit deux mois plus tard de la Gironde mais se fit intercepter une nouvelle fois par un sous-marin au large de l'île d'Yeu. Cette fois, impossible d'échapper à l'attaque : les marins reçurent l'ordre de quitter leur bord et le sous-marin réussit à couler le voilier. Cela se passa peu après minuit, le 2 mai 1917. Le capitaine Erhel et son équipage - dont son beau-frère Edouard Leforestier, embarqué comme matelot - sortirent indemnes.

Rembarquant la même année, sur un cargo cette fois, le Sénégambie de la Compagnie générale transatlantique, Joseph Erhel prit la fonction de lieutenant (il était capitaine, mais habituellement à la pêche sur des voiliers) ; ce cargo avant mené, juste avant, une mission spéciale : équipé de canons et d'un armement supplémentaire, il servait de leurre pour attirer les sous-marins ennemis et les couler. Il se fit ainsi attaquer une fois, et s'en sortit. Quand Joseph Erhel s'y trouva embarqué, une rencontre avec un sous-marin inquiéta le bord. Le cargo a finalement coulé durant la guerre, mais pas du fait de l'ennemi : un autre cargo a gravement abordé le Sénégambie à la sortie du port de Cardiff. Heureusement, Joseph Erhel en avait débarqué quatre mois auparavant.

Puis il finit la guerre, en août et septembre 1918, sur un trois-mâts, le Cher, que les Américains avaient cédé à la France au titre de l'aide économique pour renouveler sa flotte marchande grandement diminuée. Il avait repris sa fonction de capitaine, mais il dut en débarquer, victime d'une grave pneumonie consécutive aux dures conditions de navigation et à ses divers naufrages. Il ne reprit la navigation qu'en 1919.

Quant à ma grand-mère maternelle, Michèle Birot, elle n'a pas participé à un combat, mais, âgée de 9 ans à l'époque, elle se trouvait, avec sa mère et ses frères et soeur, sur un paquebot, l'Iméréthie, qui coula en avril 1916 en Méditerranée, près du détroit de Gibraltar. Voici son portrait, à la veille d'embarquer sur le paquebot (elle est à droite) :

Elle crut très longtemps qu'un sous-marin avait torpillé le navire, jusqu'à ce que, faisant des recherches, j'ai découvert que c'était un accident : en plein nuit et tous feux éteints, un bâtiment de guerre français, le Cassard, avait abordé le paquebot par le travers. L'Iméréthie mit des heures à couler - il n'y eut que deux victimes, tombés à l'eau lors de l'abandon -, ce qui a permis à un marin de l'abordeur de prendre une photo du paquebot en train de s'enfoncer dans les eaux :



Aucun commentaire: