Tandis que je continuais en 1985 de publier des articles et enquêtes dans le quotidien Ouest-France ainsi que dans divers magazines de marine ou d'aviation (voir mes précédents messages), une occasion s'était présentée pour moi, en tout début d'année, de publier une bande dessinée. Voici la couverture du numéro de janvier 1985 de la revue TAM, qui publia la BD en question :
TAM signifie Terre-Air-Mer ; c'est le magazine d'information des armées françaises, destiné au public. Depuis quelques années, un rédacteur en chef adjoint avait pour mission d'inclure de la bande dessinée dans les pages du magazine. Il s'agissait essentiellement de BD didactiques et historiques, racontant des faits militaires. Après une prise de contact avec ce rédacteur en chef adjoint - par ailleurs commandant de l'Armée de terre, détaché à la rédaction du magazine -, j'ai eu l'occasion de proposer trois ou quatre histoires dont une seule, hélas, a pu être publiée. Voici une demi-planche de cette BD en 4 planches, racontant la libération de la ville de Colmar en février 1945 (c'était donc une BD pour le quarantenaire de l'événement) :
Hélas, première déconvenue : le nom des auteurs a sauté dans le bandeau de titre (voir ci-dessus). Nul ne connaîtra le nom du scénariste (du coup, nul n'est obligé de croire que je suis ce scénariste... Cela dit, j'en parle sur mon site, à ce lien : http://www.jybaventures.net/asp/tam.asp?opc=infos ). Par ailleurs, seuls certains observateurs découvriront que le dessinateur s'appelle Brient car ce dernier a eu la bonne idée de signer une de ses planches, en petit dans un coin... (son prénom est Georges).
Deuxième déconvenue : le choix des sujets pour des BD étant tellement délicat que certains m'ont été refusés (comme une mission d'avions argentins durant la guerre des Malouines en 1982, avec tir de missiles anti-navires Exocet contre des bâtiments britanniques ; sujet encore trop "chaud" dans l'actualité, trop polémique aussi, la France ayant été accusée d'avoir aidé secrètement les Argentins...). Ces refus furent sans grandes conséquences pour nous, auteurs, car le dessinateur n'avait pas eu le temps de dessiner quoi que ce soit.
Troisième déconvenue : un autre sujet que la libération de Colmar a tout de même été accepté : le torpillage d'un navire britannique transportant en 1942, en océan Indien et en océan Atlantique, des prisonniers de guerre allemands et italiens. Le dessinateur en réalisa les 4 planches. Voici la moitié de l'une d'elles :
L'histoire aurait dû paraître dans un numéro de TAM de la fin du printemps 1985. Mais à la dernière minute, la rédaction du magazine s'aperçut qu'une péripétie de l'aventure tombait au plus mal. En effet, le navire anglais ayant été torpillé et des prisonniers ennemis barbotant dans la mer infestée de requins, une exceptionnelle trêve, acceptée par Hitler en personne, fut décidée, permettant à différents navires passant dans les parages de se rendre sur place et de sauver tout le monde, alliés comme ennemis, sans distinction, dans un but humanitaire. Mais un avion américain, un bombardier à long rayon d'action, venu lui aussi au-dessus des lieux du naufrage, s'est fait remarquer (voir la demi-planche Noir & blanc ci-dessus). On a donc su qu'un avion américain se trouvait dans ce secteur, ce qui était inédit voire impossible. En fait, l'avion venait de l'île de l'Ascension, où se trouvait alors une base secrète de l'Armée de l'air américaine. Découvrant des navires et sous-marins entre autres allemands (venus à la rescousse des naufragés), l'équipage américain, se sachant repéré, alerta sa base... qui ordonna que l'avion bombarde tout le monde pour ne laisser aucun témoin vivant ! L'avion exécuta l'ordre et en effet lança des bombes contre les bâtiments sur la mer, dont certains avaient hissé des pavillons à croix rouge, en signe de neutralité. Cette attaque injustifiée fut gardée secrète, mais dénoncée très longtemps après la guerre.
Or, au moment de la programmation de notre BD dans TAM, le Président américain de l'époque, Ronald Reagan, devait venir en France pour assister aux cérémonies du débarquement de Normandie ainsi que du quarantenaire de l'armistice et de la victoire en Europe (8 mai 1945). Pour ne pas remuer un passé trouble, surtout dans un journal institutionnel des Armées françaises, la rédaction de TAM décida de ne pas publier la BD... Georges Brient n'eut donc pas l'occasion de placer les textes dans les bulles, ni de réaliser les couleurs. Je parle aussi de l'affaire de cette BD censurée à ce lien renvoyant à une page de mon site : http://www.jybaventures.net/asp/in_brient.asp?opc=infos
A noter d'ailleurs que l'expérience "BD" dans les pages de TAM s'arrêta quelques mois plus tard (surtout parce qu'elle aura coûté cher, pécuniairement parlant, à la rédaction...).
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